L'habit ne fait pas le moine

Après avoir observé la scène en tentant de garder mon calme, je me dis que ce drôle de bonhomme en a sûrment plus dans le bide que je le pensais pour avoir tenue tête à Paul. En le voyant partir je crie :

- Hey le nouveau ! Tu viens manger avec nous à midi ?

Pourquoi j'ai dit ça moi ? Es-ce que je m'interesse vraiment à lui, où alors es-ce que c'est juste parce qu'il a tenue tête à Paul ? Bref, autant essayer de l'intégrer un peu, je sais ce que c'est que d'arriver dans un endroit où personne ne nous connait.

Je sors de cours sans me presser, pour ne pas trop me réveiller surtout. Dans le couloir je me pose contre le mur en attendant que tout le monde sorte. Le spectacle de Paul qui fait son chaud face au nouveau me laisse de marbre. Je regarde d'un oeil distrait les gens qui passent dans le couloir.

En voyant tout le monde se bouger pour ce gros gars, je me demande ce qu'ils cherchent. On a jamais fait dans l'humanitaire.

J'aime pas les gros, c'est peu être pour ça que je bougerai pas pour lui. Pourquoi Hayate y va? il a bien changé depuis quelques temps...
Mais je suis quand même fasciné par sa masse, et puis il a tenu tête à Paul, ignorance ou courage? Je m'approche finalement avec réticence de l'attroupement.

Après que Yahiko lui ait parlé je lui dit:
-Tain j'espère qu'il va pas tout nous grailler, sinon ça va mal se passer entre lui et moi.

La question avait résonné dans la tête du gros chinois. La surprise avait pu se lire sur son visage rond.

Hein ? La bande des lascards me... ? me propose de ?

Un sourire timide était apparu sur les lèvres enfantines de l'énorme jeune homme. Il acquisa de la tête comme le font les mômes a qui l'on propose une glace.

L'année dernière, un oiseau m'avait chié dessus. En plein sur le front. Finalement, cette première journée n'est pas trop mal.

Jusqu'a midi, Aï resta silencieux en souriant. Quand la sonnerie de la cantine retentit enfin, le stress le reprit a nouveau. Il était anxieux. Maman n'aimerait surement pas savoir qu'il s'accoquine avec des loubards.
Heureusement, la faim tiraillait son ventre. Et quand Aï Gongniu avait faim, rien d'autre n'était important que de remplir son estomac anacondesque.

Tommy regardait d'un air occupé et vague le visage d'Aï Gongniu, il avait bien d'autres choses en tête. Des choses à organisés, des responsabilités, des plans et beaucoup d'autres choses qu'il se savait devoir prouver mais ça il le ferait. Ses doutes ils ne les montreraient jamais, même souvent à lui même, on l'avait élu.

Umbo observait sommairement le déroulement des cours et de la récré, lui aussi semblait perdu dans le fil de ses pensées. Des pensées de lutte de pouvoir, le visage de Paul Zakta, Max et ses petites escapades, la nouvelle pression sur les épaules de Tommy qu'il se sentait le besoin d'épauler, Yahiko aussi, Jeff à la fois solitaire et en groupe, Hayate lui aussi d'une autre manière, ce gros jap... ah non chinois qui semblait avoir peur de son ombre, et puis... puis tous les autres. Sa tête était perdu à travers les nuages de la fenêtre de la salle de chimie quand la sonnerie de la cantine éructa son son cinglant.

- C'est l'heure.

Dit il pour lui même.

Le cours de chimie se passa comme tout les autres, c'est à dire en somnolant avant que la sonnerie de l'heure de la bouffe retentit. Je bondit sur ma chaise et cria :

- ON MANGE !

Puis je me rendit compte que le prof n'avait pas finit sa phrase et que j'étais seul debout au milieu de la classe, le prof me regardant avec un air de tueur. Je dis d'un ton gêné :

-Euh... désolé...Vous pouvez finir...

Puis je me rassis en rangeant mes affaires, comme de toutes façon je n'avais pas suivit le début du cours.

En me levant je me tourna vers le nouveau et lui dit :

- Allez dépèche toi sinon on va plus avoir de dessert !

Aï Gongniu leva son énorme corps. Incroyablement imposant, il suivit la bande dans le couloir. Les autres élèves qui connaissaient bien les lascards de melting regardaient, étonnés, cette nouvelle recrue impressionante, qui les accompagnait. Aï Gongniu souriait bêtement, comme à son habitude.

Enfin ils parvinrent à la cantine. L'odeur de la purée fade et de la viande en carton fit sourire de plus belle Aï. Il avait faim, très faim.

Pourquoi Yahiko lui a-t-il proposé de venir???

Je suis le groupe en espérant que personne ne nous cherchera d'emmerdes.

Bon, on est sympa avec lui. Je dois assumer les décisions du groupe. Si quelqu'un se fout de sa gueule, on lui ferme son clapet.

Je reviens à la hauteur de Aï et lui demande :

- Alors, comment ça se fait que tu arrives que maintenant?

Merci de te dévouer Jeff! T'as du courage mec, ouai... du courage...


Je reste un peu en arriere du groupe, pour m'eloigner de ce gros tas, je la joue non chalant, en prenant le temps de fumer ma clope pour aller au refectoire.

J'ai une coulée de sueur froide quand un des gros durs m'adresse la parole. Je lui répond en essayant d'être calme :

" heu bha bé en fait, heu bha je viens de déménager heu avec ma maman "

J'ai encore bégayer comme une merde, faut dire ce type la est flippant. Il me fixe avec son regard de tueur.
Ouf, on arrive enfin a la cantine, je vais pouvoir me concentrer sur mon assiette.

Je reste derrière avec Hayate. Je sais toujours pas pourquoi on joue les agences sociales, mais bon laissons une chance.

Je deviens dur avec les gens, peut être parce que personne est venu quand je suis arrivé ici...

-Bon Hayat' je voulais te parler un peu, je sais pas si c'est le moment, mais comme tout le monde est occupé avec grosse baleine, je me dit que c'est peut être l'occaze. J'ai vu que tu allais pas mal en t'exposant, que tu restais moins silencieux et que tu te mettais plus en avant. Je me demandais si c'était parce que tu vivais des trucs, ou si c'est juste parce que tu te sens en confiance avec nous. Après c'est peut être moi qui plane, on me dit que ça m'arrive souvent.

J'attend en marchant à coté de lui qu'il me réponde, et je lui taxe une clope. Pour une fois.

La question sans detour et à l'improviste de Max me prend completement au dépourvu et je reste figé un instant en le regardant derriere mes lunettes qui ne sont pas assez grande pour me cacher à cet instant.

Je lui offre une clope avec plaisir et ce simple geste me fait comprendre.

Il a raison, la confiance d'être avec des amis...

Je prend un temps de reflexion avant de lui repondre et vais ramasser quelques petites branches dans la cours de récré tandis que nous tirons sur nos cigarettes.

-Regarde, tu peux casser une branche facilement.

J'allie le geste à la parole et brise un bout de bois entre mes mains. Puis, j'en prend cette fois une poignée et les arrange en fagots.

-Maintenant, si j'essaye ce sera plus difficile de les briser. C'est un peu pareil dans le groupe, quand on est ensemble, rien ne peut nous atteindre pour nous briser.

Je jette les morceau de bois par terre et me frotte les mains pour en virer les petits bouts d'ecorces.

C'est dingue, j'ai l'impression d'avoir fait un cours de 3eme dimension...

Arrivé devant l'entrée de la cafet', je lui demande :

-Ca te dirais d'aller faire un bowling avec les deux filles de l'autre fois? Je crois que t'avais un ticket en plus.

Pas que lui d'ailleurs...

Umbo regarde les autres s'enticher du nouveau, faut dire qu'il est dans le genre hors norme. Le grand black souris tandis qu'il suit le groupe en direction de la cafétéria et qu'ils font la queue dans le circuit de barre labyrinthique qui permet de passer au final devant la bouffe du self.

Sur leur passage, certains leurs adresses des saluts, inclinent très légèrement la tête ou lèvent la main.

Umbo leurs adresses un regard ou un leger hochement de menton.

Herbert regarde Aï Gongniu tout du long de la journée avec des yeux ronds de surprise ahuri. Puis finalement il s'approche d'Aï Gongniu, son pompom s'agite sur son bonnet.

- Toi tu fais du sumo ? Tchac tchac ?

Herbert fais une pseudo imitation en attrapant de loin Aï Gongniu entre ses mains, son pompom bouge ostensiblement devant le nez d'Aï Gongniu. Puis il se remet face à lui un grand sourire benet aux lèvres.

Zora qui suivait Tommy quelques rangs derrières pose la question vers Tommy.

- Pourquoi on se trimballe ce gros ?

Tommy regarde dans la direction du chinois.

- J'en sais rien, on intègre tout le monde, il fait partie du lycée, faut voir de quoi il est capable.

Je salue ceux du groupe en passant dans les couloirs menant à la cantine. Je regarde la gueule de la bouffe qui est plus dégueulasse jour après jour...

Puis je m'assoie en face du nouveau, et je vois avec étonnement comment il ingurgite avec facilité et une étonnante rapidité le mélange de son assiette. Cette vision me coupe l'appétie...

Comment peut-on apprécier cette nourriture ???

Je pose ma fourchette et l'interroge :

- Bon alors dis moi, tu faisais quoi avant de venir ici ? Tu fais quoi en dehors des cours ? Tu fais du sport ? - ça m'étonnerais... -

Cet intéret pour le gros me laisse un peu de marbre. Il faudra d'abord qu'il fasse ses preuves.

Je sors de mes pensées:

-Bon les gars, prenez des forces pour ce soir. On va mercher longtemps et peut-être qu'on va se battre, même si c'est pas le but.

-En partant il faudra piquer un biscuit ou un autre truc sucré pour avoir de quoi tenir. Le nouveau ne nous accompagnera pas. Par contre je le prendrai à part demain ou un de ces jours pour qu'il fasse ses preuves.

-Je m'occuperai personnelement du trajet a suivre. Max, on sèchera la dernière heure de cours pour être à temps à l'autre lycée. On passera chercher une carte détaillée de la ville sur le passage.

Mon front était plissé. Ce soir sera le début d'une nouvelle ère....

Alors que je mange goulument, un des lascards me parle. Il me dévisage avec ses yeux bridés d'asiatique. Il a la même dégaine que les yakuza dans les films de kun fu. Je m'arrète un instant de manger. Une goutte de sueur me coule sur le front. Je soulève discrètement ma fesse droite et un pet huileux glisse en suitant silencieusement. Cela me détend et je peux enfin lui répondre :

" Heu du sport ? Quand j'étais nourisson j'était bébé nageur. " Dit Aï avec un grand sourire débile. " Sinon maintenant j'aide ma mère au magasin après les cours. Et toi ? Heu je veux dire, tu fais du sport ? "

Bébé nageur...

Je rigole, même si je ne veux pas me moquer. J'enfourne une énorme bouchée de purée de carotte pour me calmer, ce qui marche plutot bien.

Bas à tommy :
- Faudra penser à lui demander s'il sait se battre, si il veut faire partie des gens défendant cet établissement. Avec cette carrure il pourrait être une arme redoutable. Après un petit entrainement bien sur... Euh ya pas une drole d'odeur là?

Je gueule tout haut :
- Oh! les mecs! Qui c'est qui s'est laché? ça pue!

Je reste à en face d'Hayate pendant le repas. Je discute un peu de tout et de rien, en surveillant mon assiette, puis Tommy prend la parole.

-Ouai on va marcher longtemps ce sera chiant mais faut bien qu'on se détende. Ok pour faire péter la dernière heure, de toute façon l'histoire ça me saoule cette année.

Je glisse ensuite à son oreille:

-C'était peut être pas la peine d'en parler devant un inconnu...

Je me retourne vers Jeff:

-Tu sais ce qu'on dit, c'est la poule qui chante qui a fait l'oeuf.

Merde, mais c'est vrai qu'il y a une drôle d'odeur.

A Jeff:

-OUais il faudra voir ça.

Bien BIen.

Ayant fini de manger je m'allume un petit Connecticut Cigare et me détant, tranquille